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Les Errances Enjouées de Neus Amaëlle
Les Errances Enjouées de Neus Amaëlle
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Les Errances Enjouées de Neus Amaëlle
  • Les fantaisies d'une petite littéraire bien entourée, en quête de sérénité dans un monde joyeusement chaotique, qui aime écrire, s'intéresse à plein de trucs & trouve que la vie, même si c'est un peu n'importe quoi, c'est drôlement chouette, quand même.
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6 mai 2011

Ce que j'ai bien envie de voir dans "The Company men"

Je suis de retour en mode "je-me-la-joue-critique-cinéma-alors-que-j'y-connais-pas-grand-chose-en-fait" et j'ai bien envie de vous parler de The Company Men, que je viens d'aller voir après moultes hésitations quant au choix du film pour ma séance de ciné en solo que je convoitais depuis des semaines... Vous remarquerez au passage mon admirable habileté à disséminer des informations tout bonnement CAPITALES sur ma vie, parce que, bien entendu, vous êtes on ne peut plus curieux de tout savoir de ma palpitante existence en plus d'avoir ma pertinente opinion sur à peu près tout ce qui peut bien me passer par la tête... Que voulez-vous, c'est le XXIe siècle, c'est la révolution du net et on aime bien parler de liberté d'expression dans ces cas-là - même si, il faut en convenir, faire un blog sur son chat est une forme d'expression libre dont pourrait peut-être se passer le reste du monde... Tout ça pour dire que c'est mon blog et que je suis donc libre de parler de ce que je veux, voilà. DONC (oui parce qu'il y a une finalité logique à cette vaste parenthèse, je vous l'assure !), je vais vous dire ce que j'ai vu dans ce film...

 

company_men

 

The Company Men, par John Wells, raconte l'histoire de trois hommes qui, pour cause de "réduction d'effectif", se font renvoyer de la boîte à laquelle ils ont consacré leur vie ou du moins une grande partie de leur vie. Le personnage central, joué par Ben Affleck, répond au nom de Robert dit Bobby Walker (joli nom qui renvoie bien au mythe pionner américain n'est-ce pas ? (mais non, je ne pars pas en vrille !)), au costume toujours impeccable, à la maison de banlieue luxueuse, à la petite famille parfaite, à la Porsche beige étincelante (je sais que c'est une Porsche parce qu'ils le disent dans le film hein, je précise...) et au swing de golf redoutable se retrouve alors à enchaîner les faux espoirs pour des jobs nettement moins rutilants que son précédent emploi. Une sacrée prise de recul par rapport à son image soigneusement entretenue de "gagnant" - celle qu'on vante tant dans les exemples du "self-made man" - ce qui le conduit à apprendre une toute petite leçon d'humilité, mine de rien... Chacun tire d'ailleurs sa propre leçon de ce triste tournant : Gene McClary (Tommy Lee Jones), ex co-fondateur de la boîte, décide de redonner vie aux valeurs qui lui sont chères et qu'il essayait vainement de défendre pendant les réunions des traditionnels requins de la finance (des types grisonnants aux yeux froids peu sympathiques - étonnant, hein ?). Quant à Phil Woodward (Chris Cooper), il est brisé de voir avec quelle gratitude on traite la fidélité des ouvriers de la première heure.

 

Les interprétations, c'est toujours subjectif, donc pour être honnête, je vous dirais que le dernier bouquin que j'ai lu s'appelle "Qu'ils s'en aillent tous !", qu'Indignez-vous ! squatte mon bureau depuis que je l'ai terminé, que j'ai surligné la quasi-totalité d'un dossier sur les anti-systèmes dans un magazine et que la première page d'une revue qui traîne près de mon lit clame tranquillement qu'il faut sortir de l'impasse capitaliste... en bref, c'est un peu normal que je sois un tout p'tit peu conditionnée... Ceci dit, ça me paraît cohérent, donc je me lance : ce film montre l'agonie du système capitaliste à travers une entreprise type, en soulignant ses excès, son indifférence, sa vacuité, son oubli de ce qu'il y a de meilleur en l'homme, c'est-à-dire l'humanité. (vous avez vu ? en gras, ça fait tout de suite plus dramatique :D)

Le rêve américain s'est pris un revers : le tableau parfait de la petite vie tranquille en banlieue s'effrite pour révéler une opulence écrasante et égoïste. Les maisons dégoulinent de meubles inutilement chers et sophistiqués, on a de l'espace, du temps libre et de l'argent à ne plus savoir quoi en faire... L'incarne superbement la (pauvre) femme de Gene, qui n'entretient strictement aucun dialogue avec son mari : alors que celui-ci s'inquiète de l'avenir de ses anciens employés (que le "bad guy" a virés dans son dos), elle se demande s'il ne pourrait pas lui avoir un jet pour leur prochain week-end... Pas étonnant que Gene aille voir ailleurs. Bien sûr, on a un peu de peine pour elle, la pauvre, elle n'est pas méchante en soi, simplement d'une cécité affligeante... Mais au bout d'un moment, cet aveuglement, ce refus de voir la réalité en face (qui veut que, selon la logique capitaliste, plus les uns s'enrichissent, plus les pauvres s'appauvrissent) devient un crime, surtout dans un monde où tout le monde préfère jouer à l'autruche et/ou se plier à la main écrasante et invisible du "marché" plutôt que d'assumer les conséquences de ses actes... Comme le tendrait alors à prouver les funambules en costard sur l'affiche du film, le capitalisme serait en train de lutter pour un équilibre instable qui ne manquera néanmoins pas de s'écrouler de par sa propre absurdité : on en oublie en effet que c'est l'homme qui a créé l'économie pour servir ses besoins et non pas l'inverse - ce qui pourrait impliquer une adaptation nécessaire de celui-ci à celle-ci et qui "justifierait" toutes les aberrations et injustices du monde actuel... La preuve que ce règne du fric ne tardera pas à s'écrouler : même la cadre carriériste à l'origine des plans de licenciements renoue avec les vieilles valeurs (c'est en effet elle l'amante de Gene) et montre des sentiments réels qui la rendent de plus en plus sympathique à mesure que le film progresse.

On en vient alors à se poser quelques questions qui ne sont pas dénuées d'intérêt : ce rêve de la grande maison de banlieue remplie d'objets inutiles comble-t-elle cependant le vide créé par l'absence d'un père qui passe sa vie au bureau ? Les études interminables et hors de prix (qui mènent au bout du compte à accepter un boulot de charpentier pour lequel on vous a pistonné et pour lequel vous ne possédez strictement aucune connaissance histoire d'échapper temporairement au chômage) nous apprendraient-elles au final à mettre de côté nos valeurs pour se plier à des exigences de rendement absurdes et cruelles ? Comment a-t-on pu partir d'une entreprise de chantiers navals, qui construisait, grâce à la sueur des ouvriers, une preuve matérielle de son utilité jour après jour, pour en arriver à des gratte-ciels maniant des graphiques de valeurs virtuelles qui déterminent la vie de millions d'hommes ? Et l'identité d'un homme se réduirait-elle à sa fonction sociale, au point de ne plus voir d'autre issue que le point final après un licenciement ? Autant de questions qui semblent révéler l'effondrement d'un système, économique et de pensée, ainsi que la nécessité urgente d'un nouveau souffle qui nous ramènerait un peu plus près du sol (via des valeurs plus traditionnelles comme l'artisanat, peut-être ?)...

Le film est selon moi réussi dans le sens où il trouve le juste milieu : pas de mélodrame, ni de jugement hypercritique, une simple constatation qui s'appuie sur l'humanité, délivre un message mi-figue mi-raisin en ouvrant une porte marquée "Serait-il possible que... ?" et qui se termine sur un joli symbolisme (quoique gros comme une maison) : celui d'un bâteau tracté par un autre qui se dirige vers un ailleurs (l'Ouest...) meilleur sur fond de soleil couchant...

 

 

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