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Les Errances Enjouées de Neus Amaëlle
Les Errances Enjouées de Neus Amaëlle
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Les Errances Enjouées de Neus Amaëlle
  • Les fantaisies d'une petite littéraire bien entourée, en quête de sérénité dans un monde joyeusement chaotique, qui aime écrire, s'intéresse à plein de trucs & trouve que la vie, même si c'est un peu n'importe quoi, c'est drôlement chouette, quand même.
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1 juillet 2011

Aphorismes de poche

 

 

Vivre sa vie dans le flou artistique perpétuel le plus total fait-il de quelqu'un un/une artiste ?


(Si oui, j'en suis)

 

(29/06)

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8 juin 2011

Le cabinet vétérinaire

De l'amour des animaux.

Depuis janvier 2007, je suis l'heureuse propriétaire d'une petite boule de poils prénommée Cookie - mais plus souvent affectueusement désignée par diverses périphrases attentionnées du genre "le tas" (devenu un véritable nom générique dans ma famille), "le petit rond", "ma crêpe" et autres absurdités qui me viennent spontanément à l'esprit lorsque je niaise sur mon cochon d'Inde (car oui, il s'agit en effet d'un cochon d'Inde, comme ses nombreux pseudonymes ne le laissaient pas entendre).

A vrai dire, même si c'est parfois un peu pénible de ne pas pouvoir partir en vacances sur un coup de tête sans s'être assuré que quelqu'un s'occupe bien de votre bestiole, je crois que j'aurais beaucoup de mal à vivre sans la compagnie d'un animal... Par exemple pour le Tas, je trouve ma chambre affreusement vide lorsque je le laisse chez mes parents (et vice-versa je trouve la cuisine parentale affreusement vide quand je l'ai laissé chez moi)... Faut dire que les cochons d'Inde sont des animaux domestiques particulièrement géniaux ! ça a toujours l'air de bonne humeur, c'est gentil comme tout, c'est rigolo, ça demande pas énormément d'entretien non plus, ça pue pas trop, et puis ça communique beaucoup - à grand renfort de "pouic", de petits cris et autres roucoulements (parce que oui, ça fait un genre de ronronnement, les cochons d'Inde... Par exemple, le mien adore les petits bruits métalliques, ce qui le fait ronronner à chaque fois que je secoue mes clés - et qui en fait probablement le seul cobaye à être fan des Velvet Underground : "Sunday Morning" le fait vibrer à tous les coups !). Ce que je trouve énorme, c'est qu'ils ont des têtes super expressives... Enfin bref, je ne vais pas m'étendre plus longtemps sur la génialité de ces animaux sinon j'ai pas fini de niaiser. Tout ça pour dire que j'adore prendre soin d'un petit quelque chose, et surtout d'un petit quelque chose qui paraît bien vivant et énergique - par rapport aux plantes, pour lesquelles je n'ai pas assez de patience... Autant dire que je risque de me sentir bien seule dans ma petite chambre étudiante de l'université de Reading où je passerai une année Erasmus à la rentrée prochaine (parce que oui, je pars en Erasmus à une demi-heure de Londres, haha :D)... ! Je me soupçonne de craquer et de m'y acheter un poisson rouge, d'ailleurs... Bref.

En fait j'adore me sentir responsable du bien-être d'une petite bête et je m'y attache très vite... au risque de prendre les choses très à coeur quand elle tombe malade. En ce moment-même, d'ailleurs, mon pauvre petit tas est en convalescence - et je vous avouerai que je suis très inquiète xD. ll a dû se faire opérer et j'étais bien évidemment dans tous mes états (le pauvre, depuis qu'il est rentré de chez le véto je passe mon temps à l'observer et à le harceler pour être sûre qu'il aille bien... autant vous dire qu'il doit être bien content quand je sors !). Mais un truc que j'adore quand je vais chez le vétérinaire, outre l'odeur si particulière de médicaments et de produits nettoyants - nettement plus apaisante, étrangement, que celle de l'hôpital, selon moi - c'est l'ambiance. J'adore y voir défiler les propriétaires et leurs petits malades.

Il y a bien sûr le fait que beaucoup de gens achètent un animal qui leur ressemble - personnellement, ma part Hobbit (niveau taille, appétit et jovialité) se retrouve admirablement bien dans les cochons d'Inde, ce qui n'est pas un hasard, à mon sens... Mais c'est surtout l'attachement des maîtres, aux petits soins pour leur truc poilu en mauvais état, qui est mis à l'épreuve dans la salle d'attente et je me laisse toujours attendrir par l'application qu'ils mettent à murmurer des petits "chuuuts" et autres mots doux aux futurs patients pour les rassurer - alors même que l'appréhension se lit parfois sur leurs propres visages. Et puis, il y a les caractères des animaux qui s'affirment : les chats qui râlent, enfermés dans leur cage ; les chiens, qui sortent de leur consultation en remuant la queue de soulagement, ne croyant pas à leur bonheur d'être enfin sortis ; et puis les petits rongeurs, tétanisés, qu'on devine à peine à l'intérieur de leur boîte de transport. Mais ce qu'il y a de formidable, dans cet endroit, c'est qu'on se sent soudainement très proche des gens. C'est limite l'endroit où on peut discuter le plus facilement avec un inconnu. Vous pourriez rencontrer un type qui n'a strictement rien à voir avec vous, ne partage aucune de vos convictions, méprise vos opinions et ne comprend rien à votre façon de vivre qu'il vous demanderait quand même : "Qu'est-ce qu'il a, le vôtre ?". Et vous voilà en train de raconter avec force détails comment vous avez remarqué qu'il n'allait pas bien, toutes les questions que vous vous êtes posées à partir de là et tous les malheurs de votre animal depuis ce funeste jour où il n'a pas terminé sa gamelle. Il complimente la gentillesse du vôtre, vous la beauté du sien. Et puis, on parle éventuellement des autres animaux qu'on a à la maison, ou qu'on a eus dans le passé. On évoque les différences entre tel et tel animal, les anecdotes amusantes, les pires bêtises... Au moment de sortir, on fait un sourire en passant devant le propriétaire du prochain patient duquel on gratouille éventuellement la tête (l'animal, hein). S'il n'y a personne avec qui discuter, en attendant son tour, on regarde la liste des "Noms en..." de l'année et on se demande ce qu'on aurait choisi et pour quel genre de bestiole. A côté des bancs, il y a toujours plein de documentations du genre "Les dossiers du bon maître", des posters qui répertorient les différentes races de chiens et chats et tout un tas de mini-médicaments qui évoquent des souvenirs de dînette-parties enragées...

En plus, le personnel est bien souvent épatant. Ils aiment les animaux ; ça se voit et ça se ressent. Non seulement toutes les secrétaires que j'ai rencontrées lors de ces occasions ne manquaient jamais de venir dire bonjour à ma petite boule de poils mais en profitaient aussi pour me parler de leurs animaux respectifs. Même au téléphone, elles sont attendries en prenant des notes pour le docteur : "il s'agit d'un petit... cochon... d'Inde... :)". J'adore les dossiers, les carnets de santé et les fiches d'identité des malades qu'ils prennent grand soin de classer (avec le nom, la date de naissance, tout ça...). Et ils demandent toujours des nouvelles de l'autre bête qu'ils ont soignée l'autre jour. Les vétérinaires aussi sont formidables. Sérieux, fermes et pourtant tout dévoués, probablement très gagas face à leurs animaux respectifs ("il a quel âge ce petit bonhomme ?").

En fait, ce que j'aime tant dans cet endroit, c'est que tout le monde est réuni pour une même raison et dans le même but : l'amour des animaux et le désir de bien faire. On a un peu l'impression que tout le monde retombe en enfance. Un gros costaud peut très bien arriver tout pâlot parce que son hamster s'est foulé une patte et se faire réconforter par une petite mamie qui venait justement faire vacciner son chihuahua. En plus, en matière d'animaux les gens admettent plus volontiers leur ignorance ou leurs erreurs (contrairement à l'éducation qu'ils peuvent donner à leurs enfants) et mettent plus volontiers leur ego de côté de peur que la vie de leur petit protégé ne soit en danger s'ils ne s'en remettent pas rapidement à quelqu'un de plus expérimenté qu'eux... C'est le meilleur de l'être humain qui est en fait mis en avant dans un cabinet vétérinaire : un attachement profond pour un être fragile, dépendant et encore plus éphémère que nous qui révèle une grande sensibilité. Sensibilité qu'on tente bien souvent de cacher du reste des hommes mais qu'on met plus facilement à nu devant un animal...

 

tas

... et en voyant des photos comme celle-là, on comprend mieux pourquoi !

 

Et pour la peine, j'ajoute la chanson préférée du tas (c'est qu'il a bon goût, le bougre !).

"Sunday Morning", The Velvet Underground, The Velvet Underground & Nico.

21 mai 2011

Le monsieur de l'entretien de la station de métro.

De l'intérêt de regarder autour de soi.

 

Un truc qui me met super mal à l'aise, c'est de salir quelque chose qui vient juste d'être nettoyé. Exemple pratique, dans le métro : quand je vois "le/la technicien/nne de surface" - comme on dit, dans le langage absurdo-administratif - qui s'escrime à pousser sa machine dans tous les coins depuis je ne sais combien de temps, et puis moi, qui débarque comme une fleur et viens joyeusement saccager son heure de travail en dix secondes en laissant des traces de mes charmants petons sur le sol encore humide, j'aurais envie de disparaître pour passer inaperçu tellement j'ai honte. "Vous comprenez, j'ai envie de me justifier face à la personne concernée, il est tout à fait indispensable que je prenne le métro, parce que pendant que vous, vous restez là à vous épanouir dans un job fleurissant consistant à nettoyer derrière des inconnus qui ne vous jettent même pas un regard jusqu'à une heure tardive pour un salaire sûrement très gratifiant, moi, j'ai rendez-vous avec des amis dans un pub... Chacun ses préoccupations, que voulez-vous !" ... Ouais, bon, je sais que j'ai tendance à overculpabiliser mais quand même... Déjà que leur boulot est très probablement chiant et fatigant, voir en plus défiler des cons avec le nez vissé sur leur ipod qui marchent sur la zone où on a passé un quart d'heure et qui considèrent que c'est tout à fait normal parce que, après tout, vous êtes payés pour faire ce boulot et que vous êtes déjà bien chanceux d'avoir trouvé un job, (vous allez quand même pas demander le respect humain en prime, non ?), ça a des chances d'être un peu lassant...

Bref, tout ça pour dire que je suis toujours super gênée dans ce genre de situations et que je peux pas m'empêcher de marmonner un "pardon" en passant - même si, pour être honnête, des fois, les agents en question s'en fichent complètement... J'ai quand même une affection particulière pour le monsieur de l'entretien de la station de métro de Patte d'Oie. Faut dire que je l'y ai croisé de nombreuses fois. C'est un homme de petite taille, plutôt maigrichon, avec de gros yeux nerveux, un teint grisâtre et des cheveux très courts. Et quand je passe près de lui, des fois j'ai l'impression qu'il a la haine. La haine pour tous ces gens qui passent devant lui sans un merci, qui le considèrent comme faisant partie intégrante du décor et qui ne lui prêtent aucune attention parce que, après tout, qu'est-ce-que peut bien avoir d'intéressant à raconter un homme qui passe sa soirée à faire le ménage dans une salle carrée au gris savamment mis en valeur par une lumière blafarde ? Mais évidemment, ce serait difficile de faire remarquer qu'on est là, qu'on existe, et qu'on mériterait peut-être ne serait-ce qu'un coup d'oeil... Le contrat de travail pour être "technicien de surface" doit comprendre une clause de discrétion sous-entendue - parce que, après tout, même si l'expérience est obligatoire pour obtenir le poste, on se doute qu'on est facilement remplaçable ; donc, par temps de crise, mieux vaut fermer sa gueule... (Vous remarquerez au passage le terme employé, "technicien de surface", sensé réhausser un statut supposé dévalorisant à la base, et peut-être ainsi sensé vous doter d'un respect sur papier - à défaut d'un respect réel. Mieux que rien, vous me direz.)

Tout ça pour dire que j'ai pris l'habitude de saluer mon petit monsieur de l'entretien à chaque fois que je passe à côté de lui et que je croise son regard - lui, contrairement à d'autres (et je ne parle pas seulement des agents d'entretien), lève toujours la tête pour regarder la personne à côté de lui. Je me suis vite rendue compte que mon attitude lui faisait plaisir et qu'à chaque fois qu'il me voyait arriver, il s'attendait à ce que je lui dise bonjour - ce que je ne manquais pas de faire, profitant de l'occasion de faire un don aussi simple. Au fur et à mesure, c'est devenu de plus en plus naturel, de sorte que maintenant, on est super contents de se voir. En dehors de la taille gabarit Hobbit, je ne suis pas sûre qu'on partage grand-chose (et encore, qu'est-ce que j'en sais ?) : lui, en train de pousser sa machine dans son uniforme bleu-gris tristounet, et moi, la plupart du temps en jupette et t-shirt colorés, les écouteurs dans les oreilles. En tout cas, j'aime beaucoup notre disparité d'apparence totale qui n'empêche pourtant pas cette communion d'un instant, consistant à se sourire mutuellement. L'autre soir, j'ai eu l'impression que ça faisait vraiment longtemps que je ne l'avais pas vu, de sorte que j'ai presque eu l'impression de croiser un vieil ami - un peu plus je lui aurais demandé des nouvelles, oubliant sur le coup que je ne savais et n'avais jamais rien su du bonhomme ("Elle va bien ta femme ? ... heu, enfin j'veux dire... t'es marié au moins ?").

Je me souviens qu'une fois, alors qu'il nettoyait le quai même où j'attendais, il avait été obligé de contourner une fille pour pouvoir continuer à faire son travail. Les moments d'inattention ça arrive, mais vous n'allez pas me faire croire qu'on peut être à ce point absorbé par son téléphone qu'on ne capte même pas la présence d'une personne à trois centimètres de vous, qui attend que vous daigniez bouger, surtout quand la personne en question est assortie d'une machine grise, volumineuse et ronronnante... Il n'a pas osé interpeler la fille pour lui demander de bouger. Par contre, il m'a regardée comme s'il cherchait un témoin. Il n'y avait pas de méchanceté dans ses yeux, ni de colère, simplement de la résignation et, quelque part, un certain "plaisir" à voir que j'avais été là pour voir ça. Un peu comme s'il me disait : "Tu as vu ? J'ai droit à ça tous les soirs..." Peut-être que c'est moi qui m'imagine des trucs, mais dans tous les cas, ça m'a choquée, cette indifférence totale à son égard...

Une autre fois, je me sentais assez déprimée - et, quand je suis dans cet état-là, j'écraserais un insecte sans faire exprès, j'en pleurerais (tristement véridique) -, je me souviens l'avoir croisé une station de métro plus loin, en pleine journée, habillé en "civil". Il ne m'a pas vue - il avait les yeux baissés, pour une fois, et l'air plutôt préoccupé. Je me suis demandée combien de personnes auraient été capables de l'identifier comme celui qui passait toutes ses soirées à nettoyer leur station de métro, et combien de personnes se seraient au moins dit que son visage leur rappelait quelque chose... Ou bien s'il restait tout bonnement invisible à la plupart des gens, comme il semblait lui-même le penser. J'ai trouvé ça triste.

17 mai 2011

"Narcisse 2.0" - Facebook m'a tuer.

Un mini-extrait de l'édifiant livre dédié à la génération Y (dit des "whyers"), Facebook m'a tuer par Alexandre des Isnards et Thomas Zuber. J'ai particulièrement apprécié le chapitre intitulé "Narcisse 2.0" : il s'appuie sur l'exemple de Laëtitia qui soumet toutes ses actions (même les plus banales) par statuts facebook à son "public" amical plusieurs fois par jour...

L'introduction donne ça :

Tranquille avec son miroir tel le schtroumpf coquet à rajuster sa fleur sur le bonnet, Narcisse était autonome. Peinard, il avait sa source d'eau claire où il s'admirait jusqu'à tomber amoureux de son image puis dépérissait d'amour de lui-même pour laisser place à une fleur. Un narcisse.

L'eau claire de Narcisse 2.0, c'est les autres. Qui m'aime me suive ! Notre quotidien, nos images, nos humeurs doivent être validés par nos amis.

ça rappelle des choses à tout le monde, non ? ^^

Facebook_m_a_tuer1

 

Recueil d'anecdotes, dans lesquelles on se reconnaît (parfois !), à la fois drôles et vaguement flippantes sur "la nouvelle norme sociale", la génération des "transparents", la (non) vie privée, l'estime de soi, etc... De quoi faire réfléchir sur notre utilisation actuelle des nouvelles technologies et l'impact que celles-ci ont sur nos relations avec les autres et sur sa propre construction de soi. Facebook m'a souvent réservé de très bonnes surprises et de bons fou-rires... d'autres fois, je le vois comme un outil perturbant, presque écoeurant, synonyme de "t'as rien de mieux à foutre ?!" (oui je sais c'est fort xD). A utiliser avec modération, pourrions-nous dire... !

De quoi réfléchir aussi sur sa propre originalité pré-supposée ; quand on lit des commentaires (des "vrais", tirés de Twitter ou Facebook) qu'on aurait aussi bien pu écrire nous-mêmes tout en croyant être quelqu'un de super drôle et d'intéressant...

A lire et à méditer, donc !

(D'autres extraits du livre sont dispos (ainsi que plein d'articles intéressants sur le sujet) sur Facebook m'a tuer.)

 

 

16 avril 2011

Les bonnes surprises des petites rues toulousaines : La galerie Concha de Nazelle, l'exposition sur Jean-Claude Machek.

De l'intérêt de flâner dans les rues quand il fait beau et de suivre sans complexe ses instincts d'insecte*.

(*c'est-à-dire de rentrer quand il y a de la lumière)

 

Etant en pleine période pré-partiels, je me suis accordée, entre deux vernissages d'un festival pour lequel je suis bénévole, une petite aprèm shopping ensoleillée... (si, si, il y a un lien logique entre le début de la phrase et le reste, je vous assure ! ... Non mais vous comprenez, j'avais plus de pâte à fixe ni de crème hydratante il était donc tout à fait nécessaire que j'aille en ville, et notamment à Lush... ! Voilà... hum.) Bref.

En me baladant dans les ruelles pour éviter la surpeuplée rue Saint-Rome, je suis tombée sur une toute petite galerie d'Art que je n'avais jamais vue avant. Intriguée par les murs tout blancs, l'absence d'informations et surtout les paysages colorés exposés à l'intérieur, je me suis finalement décidée à pousser la porte "entrée libre". Personne dans la pièce d'entrée. Je commence à regarder les peintures autour de moi, à peine troublée par le léger décalage entre le calme du lieu et ma tenue vestimentaire (jean rouge pétard, T-shirt Muse-je-suis-allée-à-leur-super-concert-au-stade-de-France-et-je-m'y-suis-ruinée-en-achetant-ceci-tout-en-considérant-que-ça-valait-vachement-le-coup-d'où-le-fait-que-je-l'arbore-actuellement, sac Eastpak en bandouillère jaune poussin et casquette bleue à carreaux vissée sur le crâne (évidemment)).

Souvent, quand j'entre dans un lieu désert comme ça, j'ai presque envie de ne laisser aucune trace, de faire la "petite souris" et de ne rien toucher pour juste profiter un instant de l'ambiance ; m'imprégner du lieu et des tableaux puis disparaître avant que quelqu'un ne vienne... Bizarrement, ce genre d'endroit me donne presque l'impression de ne pas avoir le droit d'entrer, comme si j'allais déranger quelque chose. Peut-être parce qu'on ne se sent pas forcément à sa place. On se dit que c'est prétentieux de se juger apte à comprendre l'expression d'un artiste en un regard... Ou alors, plus simplement à cause de la sérénité du lieu. Un peu comme si on allait interrompre un dialogue silencieux entre les oeuvres (genre Toy Story, mais version tableaux, si ça se trouve ils ont une vie à eux une fois qu'on a le dos tourné... Bref.) De toute façon, pas la peine de penser à m'éclipser ici, le carillon de l'entrée avait bien fait son job - et puis, j'étais d'une bonne humeur imperturbable, un ogre à trois têtes m'aurait chassée à coups de massue en me beuglant "Y'avait marqué "entrée libre" mais c'était parce que je voulais que personne ne rentre, AAAARGH !" je serais quand même repartie en souriant.

Arrive donc - non pas un ogre - mais une petite madame en blazer et aux cheveux courts qui me présente immédiatement l'artiste exposé : il s'agit de Jean-Claude Machek, un artiste local et contemporain, qui a suivi une formation classique aux beaux-arts et présente ici ses paysages de la région, des huiles sur papier. "Celles-ci, me précise-t-elle en désignant quelques toiles sur le mur de droite, sont voulues par l'artiste comme des paysages érotiques." "Ah bon ?" Légèrement perplexe, je regarde d'un peu plus près et distingue en effet quelques formes suggestives ici ou là, sans toutefois me sentir particulièrement émoustillée. "D'accord..." ai-je finalement commenté, ma nouvelle devise "Et pouwquoi pas ?" en tête. Après être restée quelques instants avec moi et m'avoir posé quelques questions ("Vous reconnaissez les bords de la Garonne ?" (je dois dire que, dans ma bonne logique, ça ne m'avait même pas effleuré ; j'étais plutôt dans l'optique "Oh ! une rivière ! c'est joli :D"), "Vous êtes peintre ?" ("Heu non, pas du tout !")), elle finit par me laisser pour aller jouer quelques notes sur un piano dans la pièce d'à côté (la présence de l'instrument me paraît d'ailleurs, maintenant que j'y pense, vaguement incongrue ; pourtant sur le coup ça ne m'a pas étonnée plus que ça).

J'ai donc examiné à loisir les tableaux affichés et je dois dire que j'ai beaucoup aimé. Les couleurs sont très vives - et c'est bien ce qui m'a attirée à la base - étalées par de grands coups de pinceau large : beaucoup de jaune, de vert, de rose, de bleu... Le résultat est original, étrangement parlant, apaisant et même émouvant. Un peu énigmatique, aussi, comme le restera sûrement toujours un peu Mère Nature à nos yeux de pauvres humains dénaturés. Des vues campagnardes, telles qu'on a pu en peindre des millions de fois (meules de foin, champs, orée d'un bois...) mais la stylisation, le support (jamais vu des huiles sur papier avant !) et même le choix des vues, qui témoignait d'une nette influence photographique pour certaines, rendaient compte d'un travail vraiment personnel. En jetant un coup d'oeil sur le livret qui récapitulait son parcours, j'ai été intéressée de voir qu'il avait travaillé sur beaucoup de choses différentes - notamment sur des tableaux hyperréalistes, style qui m'a toujours impressionnée (pour le peu que j'en sais).

Je suis ensuite passée à l'autre salle où était exposé le reste des peintures et où se trouvaient le piano et le bureau de ma petite madame - ainsi que la petite madame elle-même, d'ailleurs. Comme je n'avais jamais vu la galerie avant, je lui ai posé quelques questions et s'est alors entamée une discussion très agréable. Elle aussi avait fait des études de lettres et en était, elle aussi, très contente - d'où un petit intermède sur mon programme, et notamment Rabelais (cf mon dernier craquage). Je n'ai pas pu m'empêcher de lui demander comment elle en était arrivée là ("Comment j'en suis "arrivée là" ? mais je ne suis pas en prison !" xD), intriguée que j'étais par son métier. Elle m'a alors révélée qu'elle avait toujours été entourée d'artistes, alors qu'elle-même ne savait pas tenir un pinceau, et qu'elle se voyait comme une sorte de transmetteur, comme le cuivre. Elle a ajouté : "Vous savez, on le sent quand on est à sa place et ici, je me sens bien.", phrase qui m'est restée en mémoire parce que, pour le coup, je voyais exactement ce qu'elle voulait dire. De plus, je concevais parfaitement qu'on puisse se sentir bien ici, entre ces murs frais et lumineux, rassurants. "Vous êtes sûre que vous n'êtes pas peintre ?" (bah oui, plutôt xD) "Heu non, non, je m'intéresse à l'Art en général, c'est tout." "J'ai écouté une émission sur France Culture qui était très intéressante ce matin. Ils essayaient de définir l'Art... vous devriez essayer de la podcaster, si vous pouvez." "Ah oui, je regarderai sur le site internet alors, merci !"

Après quelques minutes, est finalement entré quelqu'un - qui s'est ensuite révélé être sa fille et sa petite-fille - qui a interrompu notre conversation. J'ai alors terminé mon petit tour de la galerie et les ai rejointes dans l'entrée où la madame m'a présentée à sa famille. "Regardez ma petite-fille, elle est ADORABLE !" déclara-t-elle en toute objectivité. Pour le coup, la madame a eu de la chance que je sois tante (dite "Tine Mé") depuis presque deux ans sinon j'aurais peut-être peu partagé son enthousiasme devant l'enfant qui, j'avoue, était choupette avec ses petites chaussures, ses collants à motifs, sa robe et surtout ses grands yeux souriants qui me dévisageaient avec curiosité. Furent également invités à profiter de la convivialité ambiante deux types qui, comme moi deux minutes auparavant, hésitaient devant la vitrine ("N'hésitez pas à entrer, sinon on sert à rien nous vous savez !") et ça m'a amusée de les voir contraster gaiement avec le lieu eux aussi (ils étaient un peu dans le style lycéen/surfeur). Je remerciais la petite madame pour la conversation qui m'avait fait bien plaisir - "Mais à moi aussi !" - et les ai laissées en famille.

 

=> Bilan : Je préfère passer sous silence les sommes honteuses que j'ai dépensées cet après-midi là pour plutôt privilégier le fait que cet épisode m'a amenée à écouter une émission sur l'Art sur France Culture hier matin (même si je suis pas sûre que ce soit bien celle dont elle m'avait parlé xD), m'a donné envie de lire des traités sur le paysage (mais peut-être pas sur leur érotisme, quoique cette histoire m'intrigue un peu, quand même... xD) et m'a surtout fait ressentir la simple et douce satisfaction d'avoir profité pleinement de mon après-midi tout en m'enrichissant. Le pouvoir de l'Art, hein, c'est fou ! Et le truc encore plus fou, c'est que je viens de voir que l'exposition s'est terminée hier... Comme quoi j'aurais aussi bien pu passer à côté et ignorer totalement tout ça pour le restant de mes jours - ce qui n'aurait certes pas bouleversé l'intégralité du cosmos, mais quand même, je reste toujours médusée devant ces petits hasards qui rendent la vie de tous les jours si riche... !

 

=> La Galerie Concha de Nazelle,

5 rue du Puits Vert (juste à côté d'un super restau végétarien trop génial, La Faim des Haricots :D)

 

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26 février 2011

Le yoyo affectif.

Nouveau craquage :

Les super concepts pertinemment indispensables et nécessaires à votre existence sur la vie made by myself.

 

Parce que je ne peux pas m'empêcher de créer des pseudo-néologismes farfelus (voire paradoxaux) pour qualifier le monde qui m'entoure et me fascine un peu plus tous les jours. Parce que, aussi, il faut savoir qu'on appréhende les choses par le langage et que donner un nom aux choses permet d'avoir un semblant de contrôle (illusoire, certes, mais c'est un début !) sur les événements - ou bien de les identifier plus facilement... Dans tous les cas je trouve ça rassurant !

BREF.

Le premier sera donc... (parce que oui, j'adore la logique donc je commence par un truc en "Y")

 

Yoyo affectif (le) : expression désignant l'état de quelqu'un de sensible capable de passer d'un sentiment à l'autre (parfois son contraire) en très peu de temps. Cette notion est à rapprocher de l'acceptation du sujet de sa propre sensibilité, toujours changeante puisqu'en perpétuelle évolution, comme le veut l'impermanence (concept bouddhiste qui dit que tout est éphémère, et en particulier notre "moi", qui n'a pas d'essence propre mais est vu comme une succession permanente d'états différents).

Exemples d'utilisation : "P****n, j'ai encore joué au yoyo affectif hier..." ou "Tiens, et si je faisais le yoyo affectif aujourd'hui ? ça fait longtemps !". (Remarquez qu'en statut facebook, ça passe super bien aussi : "Victime du yoyo affectif...". Niveau désenchantement mystérieux, ça jette du bois !)

Le mauvais côté : le yoyo est la plupart du temps soit tout en haut, soit tout en bas ; d'où un juste milieu difficile à atteindre... (et c'est souvent très fatigant)

Le bon côté : quand le yoyo est en bas, il ne peut que remonter ! (comme l'illustre parfaitement bien la chanson des Hives ci-dessous :D) (et puis faut bien dire qu'on ne s'ennuie pas !)

 

The Hives, "Try It Again", The Black & White Album.

 

16 février 2011

Six Feet Under

 

 

"Every life is a contribution. We just may not see how. [...]

Everyone comes into our life for a reason and it is our responsability to learn what they have to teach us."


 

tiré de "La Femme Invisible", épisode 5 de la saison 2 de Six Feet Under.

 



22 janvier 2011

Les cinq personnes que j'ai rencontrées là-haut, Mitch Albom.

Un roman que j'ai lu il y a déjà quelques années et qui m'est revenu à l'esprit récemment. Il est assez court, peut-être un peu simpliste aussi, mais au moins il va à l'essentiel au niveau du "message" (émouvant) qu'il veut faire passer.

C'est l'histoire d'un vieil homme, Eddie, qui meurt (dit comme ça c'est assez cru, mais je ne vois pas comment le dire autrement xD) et qui, une fois au paradis, rencontre cinq personnes. Celles-ci ont soit influé sur sa vie de façon directe ou indirecte, soit ont vu leur propre existence être altérée par celle d'Eddie. On s'en doute, ces cinq personnes ont pour mission de lui apprendre certaines leçons sur la vie et la sienne en particulier, ce qui lui permettra au final de reposer en paix. Au programme : la vérité, la compréhension, le pardon, l'amour et tout plein de bonnes choses du même genre ! Il faut préciser qu'Eddie pense avoir raté sa vie, coincé après son service militaire dans le même job ennuyeux qu'exerçait autrefois son paternel : réparateur de manèges à Ruby Pier (un parc d'attractions) et est de ce fait convaincu de ne pas avoir apporté grand-chose au reste du monde. Le but sera, bien sûr, de lui faire comprendre que chaque vie humaine possède une importance intrinsèque indéniable et que lui-même n'échappe pas à la règle... !

 

albom

 

Le passage que j'ai choisi est un extrait de "La deuxième leçon". Après "l'Homme Bleu", le second personnage qu'Eddie rencontre au ciel n'est autre que son ancien commandant lorsqu'il servait à la guerre - guerre qui est décrite évasivement mais dont on peut deviner qu'elle fait référence à celle du Vietnam (Mitch Albom est Américain et on sait à la fin que le conflit se déroulait en Asie...). Il vient de raconter (ou plutôt de "montrer") à Eddie sa propre mort : alors qu'il guidait sa troupe, transportant Eddie blessé à la jambe et en proie à la fièvre, il marche sur une mine.

 

"Oh, mon Dieu, oh, mon Dieu ! Je ne savais pas, mon Capitaine. C'est révoltant. C'est horrible !"
Le Capitaine hocha la tête puis détourna le regard. Les collines avaient retrouvé leur aspect dénudé, les ossements d'animaux et la nacelle en mille morceaux, ainsi que les restes incandescents du village. Eddie comprit que c'était là le cimetière du Capitaine. Pas de cercueil ni de funérailles. Juste son squelette en mille morceaux, et la terre boueuse.
"Vous avez attendu ici tout ce temps ? murmura Eddie.
- Le temps n'est pas ce que tu t'imagines, lui répondit le Capitaine en s'asseyant auprès de lui. La mort ? Ce n'est pas la fin de tout, contrairement à ce que l'on croit. Notre vie sur terre n'est jamais qu'un commencement."
Eddie semblait perdu.
"C'est un peu comme dans la Bible, le marché conclu avec Adam et Ève, lui expliqua le Capitaine. Lors de la première nuit d'Adam sur terre, il se couche pour dormir et, ignorant ce qu'est le sommeil, se dit que c'est terminé. Ses yeux se ferment et il pense qu'il va quitter ce monde, OK ?
"Sauf que ce n'est pas le cas. Il se réveille le lendemain matin et il a affaire à un monde tout neuf, avec en prime cet acquis supplémentaire qu'est le jour précédent."
Le Capitaine eut un large sourire.
"C'est la même chose ici, soldat. Voilà ce que représente le Ciel selon moi : un endroit où l'on peut tirer la leçon des jours précédents."
Il sortit son paquet de cigarettes en plastique et le tapota du doigt.
"Tu me suis ? Je n'ai jamais été très pédagogue."
Eddie le regarda attentivement. Il se l'était toujours imaginé bien plus âgé. Mais aujourd'hui, et alors qu'il était débarrassé d'une partie de la poussière de charbon, il se rendait compte que le visage du Capitaine était à peine ridé, et sa chevelure noire abondante. Il n'avait pas dû dépasser la trentaine.
"Vous êtes resté ici depuis votre mort, reprit Eddie, mais c'est deux fois plus long que votre vie !"
Le Capitaine acquiesça.
"Je t'attendais."
Eddie baissa les yeux.
"C'est ce que m'a dit l'Homme Bleu.
- Eh bien, lui aussi faisait partie de ta vie, de ce que tu as vécu et de la façon dont tu l'as vécu, partie de l'histoire qu'il te fallait connaître ; maintenant qu'il te l'a contée, il est loin d'ici et je le serai bientôt aussi. Alors écoute bien ce que tu as besoin que je t'apprenne."
Eddie sentit son dos se redresser.
"Un sacrifice, dit le Capitaine. Tu en as fait un. J'en ai fait un. On en fait tous. Sauf que le tien t'a rendu furieux. Tu n'as pas arrêté de penser à ce que tu avais perdu.
"Parce que tu n'as pas compris ; que se sacrifier fait partie intégrante de la vie. Il faut faire des sacrifices. On ne doit pas les regretter mais plutôt y aspirer, qu'ils soient petits ou qu'ils soient grands, que l'on soit une mère qui travaille pour payer des études à son fils, une fille qui revient chez ses parents pour s'occuper de son père malade.
"Ou un homme qui part à la guerre...
"[...] Je ne suis pas mort pour rien [...]. Cette nuit-là on aurait tous pu passer sur cette mine antipersonnel, et là on aurait été quatre à disparaître."
Eddie secoua la tête.
"Mais vous..." Il baissa la voix. "Vous avez perdu la vie."
Le Capitaine fit claquer sa langue.
"Nous y voilà. Parfois, quand on sacrifie quelque chose de précieux, on ne le perd pas vraiment. On se contente de le transmettre à quelqu'un d'autre."


Bon, je dois le reconnaître, tout ceci a un léger parfum de christianisme (ne serait-ce que par la référence à la Bible et la base même du bouquin qui présuppose un simili-paradis après la mort, avec pérennité de l'âme tout ça, tout ça), et le côté "être militaire, c'est bien, c'est grand, c'est noble, ça revient à se sacrifier pour son pays, sa nation, sa famille, ses amis blablabla" peut être considéré comme un peu dérangeant (ça l'est pour moi, en tout cas), il n'empêche que l'intrigue est loin de minimiser les conséquences de la guerre (blessé à la jambe, la vie d'Eddie ne sera plus jamais la même - d'où le "sacrifice") ou d'en faire l'éloge, au contraire, les descriptions concernant cette partie de la vie d'Eddie sont loin de présenter une image manichéenne du conflit et privilégient plutôt un certain réalisme, envisageant le conflit d'un point de vue très humain sans imposer de jugement, ni sur les causes défendues, ni sur les soldats, ni sur les ennemis... De toute façon, tout le livre s'appuie énormément sur les émotions (très pures donc d'autant plus intenses) et, par la simplicité de l'intrigue et du style, permet de donner une vision plus globale à travers le personnage d'Eddie sur le monde et la vie en général - ce qui, à mon sens, suscite un nouveau regard par rapport à la sienne propre. D'ailleurs, une des phrases de publicité pour ce livre disait : "Le roman qui réconcilie avec la vie !", et honnêtement, je trouve qu'il y a du vrai... ! ça diffuse de belles idées et souligne les bonnes valeurs traditionnelles qui, même si c'est de la redite, sonnent toujours agréablement à l'oreille - parce que, c'est beau, quand même ! Ce qui m'a amusé, c'est que j'ai retrouvé là-dedans certaines notions qu'on trouve dans le bouddhisme (oui, ça faisait trop longtemps que j'avais pas taggué "bouddhisme" dans un article qui n'a a priori rien à voir avec la choucroute :D), notamment celle de l'interdépendance (qui dit que tous les individus sont non seulement reliés entre eux mais aussi à leur environnement) et ça, ça m'a vachement plu - un peu comme toutes les notions bouddhistes :D.


PS : Je ne sais pas ce que donne le livre en VO, mais comme l'histoire est assez simple il y a des chances pour que ce soit abordable :)

25 décembre 2010

"Un an." (poème approximatif)

Un an,

 

           C'est rien.

 

           Et pourtant...

 

 

 

Il y a un an,

 

Je n'étais pas née,

 

- Ou à peine.

 

 

Il y a un an,

 

Je ne te connaissais pas.

 

Il y a un an,

 

Je ne me doutais de rien

 

Il y a un an,

 

Je ne savais rien

 

Ni de toi, ni de moi.

 

Et ça m'allait comme ça

 

Je n'avais pas vraiment le choix.

 

Et c'était bien comme ça.

 

C'était.

 

 

 

 

Depuis un an,

 

 

 

Ma vie est un bouleversement permanent.

 

 

 

 

Par un soir de Noël tout blanc

 

Alors que personne ne t'attendait

 

- Et certainement pas moi -

 

Peut-être que toi aussi,

 

Tu réapparaîtras.

 

Comme un soleil qu'on croyait perdu

 

A jamais

 

En fait simplement caché,

 

En retrait

 

Derrière un nuage

 

- Une mauvaise brume.

 

 

… Ce serait beau, tu ne crois pas ?

 

Tout un symbole...

 

La nuit du messie...

 

Et puis,

 

La neige, le printemps,

 

Le bourgeon, la renaissance,

 

Et tout le tralala.

 

 

Pour ce que j'en sais,

 

- Après tout -

 

La vie pourrait très bien

 

Manger de ce pain-là.

 

 

 

En un an, on en fait des découvertes

 

En un an, tout peut changer

 

En un an, tout change.

 

 

Il suffit d'un instant

 

- Rien qu'un seul -

 

Pour tout faire basculer

 

Du bon comme du mauvais côté

 

- Et au fond, je crois que c'est le même.

 

 

La chute d'une feuille morte,

 

Vestige d'un ancien monde

 

A présent révolu,

 

Maintenant disparu

 

– Ou presque.

 

 

Des routes qui se croisent,

 

Un chemin

 

Qui en rejoint un autre.

 

Peut-être pas pour longtemps

 

- Mais comment savoir ?

 

Et pourquoi le vouloir ? -

 

 

Un ressenti

 

- Celui,

 

Difficile à voir

 

Comme à admettre,

 

Qu'il n'y a plus de marche arrière,

 

Qu'il n'y en a même jamais eu

 

Et pourquoi le souhaiter ? -

 

 

Une musique,

 

Des paroles,

 

Des notes,

 

Une voix

 

Qui résonnent

 

Au loin,

 

Là-bas.

 

 

Un regard,

 

Un déclic,

 

Un choix,

 

Un Mot.

 

 

Un espoir, surtout.

 

- Vraiment rien du tout.

 

 

 

 

J'espère...

 

 

 J'espère que ça ira

 

 Qu'on s'en remettra

 

 Toi comme moi.

 

 

Chacun son fantôme,

 

Chacun sa foi,

 

Chacun sa loi,

 

Chacun son moi,

 

 

 Et chacun chez soi.

 

 

Mais je n'espère pas, en fait :

 

 Je le sais

 

– même si c'est bête.

 

 

 

Un an,

 

Une année,

 

Une année-lumière,

 

Un nouvel espace-temps,

 

Bien différent du précédent,

 

Et une nouvelle histoire.

 

 

La tienne, peut-être,

 

La mienne, sûrement.

 

 

 

 

Alors, dans un an...

 

 

 Dans un an, qui sait ?

 

 On peut toujours jouer

 

 A essayer de deviner

 

 Même si ça ne sert à rien.

 

 A rien et à rien de s'inquiéter

 

 Car tout ira bien, à présent.

 

 

 Maintenant que rien

 

   N'est plus comme avant

 

 Maintenant que tout

 

   Est déjà différent.

 

 

 Dans un an, un tout nouveau monde

 

 - aujourd'hui en germe,

 

 Secrètement -

 

 Naîtra, peut-être.

 

 Avec un peu de bonne volonté,

 

 Avec un peu de chance, aussi

 

 Et des deux, j'en ai plein

 

 A mes côtés,


 Partout,

 

 En moi.

 

 

 

Dans un an, je serai

loin.

 

29 novembre 2010

Les gens, Philippe Labro

Un passage tiré de la fin du dernier roman de Philippe Labro, Les gens. J'avoue avoir été très intriguée par ce bouquin à cause des grandes affiches qui bariolaient la gare et encore plus par la phrase qui l'ornait : "Tout commence par un manque d'amour", d'un philosophe chinois (Mo-tzu). L'histoire raconte le destin de trois personnages qui n'ont pas grand-chose en commun et que les hasards de la vie vont pourtant faire se rencontrer. J'ai trouvé que l'intrigue était bien construite et originale. C'est surtout la vision de l'auteur qui m'a parue juste - enfin, c'est plutôt que ça colle avec ma façon de voir... Mais ce que j'ai préféré là-dedans, c'est les sortes d'intermèdes dans l'intrigue qui introduisent des personnages anonymes qui viennent des quatre coins du monde et qui permettent, d'un coup, de prendre un recul énorme par rapport à l'action. On se voit soudain, soi, un grain de sable parmi tant d'autres, en train de lire un bouquin, un parmi des milliards, et, concrètement, on se prend une bonne claque dans la gueule. Je me laissais complètement happer par ces passages, encore plus que par le roman en lui-même. L'extrait que j'ai recopié ici est celui qui m'a le plus émue.

gens1

Il existe des centaines de milliers d'univers, les myriades de segments les plus divers d'une société dont le degré de civilisation se mesure au nombre de contradictions qu'elle comporte. Ces univers sont séparés, inconnus les uns aux autres, indifférents les uns aux autres. Mais quelque chose les unit, le seul lien commun qui tisse cette carte inimaginable, cette toile arachnéenne aussi bien nationale que mondiale et que domine la peur, comme l'espoir. Tous sont soudés par la puissance de ce qui a révolutionné les mœurs : l'image, et sa transmission immédiate.

Les gens, c'était tout le monde et c'était n'importe qui. Souvent, ils ne savaient plus très bien où ils en étaient, les gens. On leur expliquait que la banquise arctique fondait, que les ours polaires allaient mourir, que des inondations géantes feraient disparaître des îles, puis des villes et peut-être des continents, et que le poumon d'oxygène du monde continuerait d'être déforesté, que l'asphyxie les gagnerait tous un jour, et sinon eux, du moins leurs enfants ou leurs petits-enfants, ou leurs arrière-petits-enfants. Et pourtant, ils continuaient de faire des enfants, les gens. Ils continuaient d'aimer, construire, inventer, créer, soigner, rechercher, enseigner, lutter.

Les gens, on leur expliquait que l'économie du monde basculait, que les séismes et les tsunamis, les cyclones et les éruptions volcaniques, les marées noires et les fuites des centrales nucléaires, les massacres et les génocides, tout cela n'était rien par rapport à ce qui pouvait encore leur arriver. On leur prédisait des années de privations et de crises, et ils comprenaient qu'ils n'étaient à l'abri d'aucune guerre, d'aucun geste fou d'un dictateur fou, à l'abri d'aucune catastrophe mondiale qui remettrait en question la trame même de leur vie quotidienne. Et pourtant, ils ne l'acceptaient pas, et, s'ils ne se révoltaient pas encore, ils opposaient à la noirceur des choses la force de la vie.

Tous enfants de la même algue bleue, tous issus de l'universelle et commune cellule ancestrale, ils suivaient l'évolution, le phénomène dont personne ne connaissait l'ultime bout de course – s'il devait jamais y en avoir un. Ils avaient intégré la notion de l'imminence de l'impossible. Ils vivaient dans l'âge de l'instantanéisme, l'immédiateté universelle, l'accélération des événements réels. Le chaos. Personne ne pouvait plus leur proposer le « point fixe » dont avait parlé Pascal. Et pourtant, ils se soumettaient à la grande loi de la nature comme à un mouvement perpétuel, ils continuaient. Ils n'avaient pas d'autre choix. Il faudrait bien qu'ils s'adaptent, les gens, ils l'avaient toujours fait.


Les gens de gauche disaient : Les choses sont intolérables. Les gens de droite disaient : Les choses sont inévitables. Les sages disaient : Les choses sont ce qu'elles sont.


Churchill disait : L'optimiste est quelqu'un qui voit une chance derrière chaque calamité.

 

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